Discours d’ouverture du 16e congrès des internes de médecine générale

16e Congrès National des Internes de Médecine Générale
Toulouse – les 30 et 31 janvier 2015
Discours d’ouverture de Pierre-Antoine MOINARD – Président de l’ISNAR-IMG

Seul le prononcé fait foi

À Toulouse, le 30 janvier 2015.

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, chers congressistes, chers Internes,

Bienvenue à Toulouse !

Bienvenue au Centre de Congrès Pierre BAUDIS pour assister à ce 16e Congrès National des Internes de Médecine Générale intitulé « De la formation à l’installation, décollage immédiat ! ».

Je m’appelle Pierre-Antoine MOINARD, je suis interne de Médecine Générale en cinquième semestre à Brest, Président de l’ISNAR-IMG, et j’ai l’honneur de déclarer le 16e Congrès National des Internes de Médecine Générale ouvert !

[VIDEO D’OUVERTURE]

Madame la Ministre,

Madame la Présidente de la Commission des Affaires sociales à l’Assemblée Nationale,

Mesdames et Messieurs les Conseillers,

Mesdames et Messieurs les Élus,

Monsieur le Président de la Conférence nationale des Doyens de faculté de médecine,

Monsieur le Président du Collège de la Médecine Générale de Midi-Pyrénées,

Monsieur le Président du Collège National des Généralistes Enseignants,

Madame la Directrice et Monsieur le Coordonnateur du Département Universitaire de Médecine Générale de la Faculté de Toulouse Rangueil,

Madame la Présidente de l’Association des Internes de Médecine Générale de Midi-Pyrénées, chère Lucie,

Chers congressistes, chers internes,

La liste des personnalités présentes est longue. C’est un exercice toujours un peu rébarbatif, pour celui qui l’égrène, comme pour ceux qui l’écoutent.

En miroir, une autre liste est courte mais brille par sa constance d’année en année et de congrès en congrès. C’est celle de l’absence de représentant du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, aux abonnés absents.

Jusqu’à hier, Madame Geneviève FIORASO, Secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche, n’avait pas jugé utile de répondre aux invitations que nous lui avions adressées. Aucune raison de s’inquiéter. Notre formation ne fait l’objet d’aucune réforme majeure en cours tandis que la recherche et la Filière Universitaire de Médecine Générale se portent à merveille !

Jeudi 29 janvier, nous avons finalement reçu un courrier signé de Madame FIORASO et des appels des ses conseillers, m’invitant à vous lire ce courrier. Vous apprécierez d’abord ici le respect de l’indépendance syndicale dont fait preuve le Secrétariat d’Etat à l’Enseignement supérieur et à la Recherche en demandant au Président de l’ISNAR-IMG de se faire leur porte-parole. Retenue à Grenoble dans le cadre de missions relevant de son mandat parlementaire, Madame FIORASO nous fait part dans ce courrier, je cite, de « [son] profond regret de ne pouvoir être parmi [nous] ce vendredi » et précise que « ce n’est que partie remise ». En effet, le 16e Congrès des internes de médecine générale prenant fin demain midi, il est encore possible pour vous, Madame la Secrétaire d’Etat, de choisir de vous rendre disponible pour venir rencontrer les internes et vous adresser à eux demain matin.

En 2015, les internes de médecine générale français ont deux Ministères de tutelle mais un seul interlocuteur. Tâchons d’y voir surtout une raison supplémentaire de remercier ceux qui sont présents de l’être. Madame la Ministre, merci de nous faire l’honneur de votre présence.

Cette édition 2015 du Congrès national des internes de médecine générale est d’abord celle d’une affluence record puisque vous êtes 784 internes présents aujourd’hui à Toulouse ! Merci d’être venus aussi nombreux de toute la France pour assister à ce Congrès, organisé de A à Z par des internes pour des internes.

Les deux jours que nous allons passer ensemble seront l’occasion d’échanger autour des thématiques choisies pour les tables rondes et les ateliers auxquels vous allez assister et dont vous trouverez le détail dans le programme qui vous a été distribué.

Prise en charge de la santé de l’interne, interprofessionnalité, installation, thèse, erreur médicale ou encore doute diagnostique et thérapeutique sont au menu de ce Congrès.

Les deux jours que nous allons passer ensemble seront aussi et surtout le moment d’échanger autour des trois grands dossiers qui animent cette année 2014-2015 et qui intéressent les internes de médecine générale.

Le premier, c’est la réforme du troisième cycle des études médicales.

Je profiterai de la séance plénière prévue en début d’après-midi aujourd’hui pour vous présenter les résultats de l’enquête formation menée par l’ISNAR-IMG auprès des internes de médecine générale il y a un an et sur laquelle s’appuient les propositions formulées par le Conseil d’Administration pour le futur D.E.S. de médecine générale.

Un D.E.S. en trois ans, sans obligation de stage au C.H.U. et dont la moitié des stages au minimum seraient ambulatoires.

Nous avons également souhaité profiter de l’occasion de ce Congrès pour demander au Professeur Vincent RENARD, Président du Collège National des Généralistes Enseignants, de vous exposer les propositions de nos enseignants pour ce même D.E.S. de médecine générale.

Dans tous les cas, la réforme du troisième cycle ne pourra être considérée comme réussie pour la médecine générale que si la formation à cette spécialité prend le virage ambulatoire qu’internes et enseignants appellent urgemment de leurs vœux et que le choix politique est enfin fait de donner aux généralistes les moyens de se former à leur futur métier.

Le deuxième de ces dossiers, c’est la réforme du temps de travail des internes.

Depuis juin 2013 et la mise en demeure de la France par la Commission Européenne, les internes français attendent la mise en conformité de la réglementation nationale avec la directive européenne relative au temps de travail.

Depuis janvier 2014, l’ISNAR-IMG et les autres structures syndicales d’internes français travaillent avec la Direction Générale de l’Offre de Soins à formuler des propositions en vue de réduire le temps de travail des internes.

Depuis octobre – novembre 2014, les arbitrages politiques sont rendus.

Depuis, le temps passe et les textes satellites de l’objectif initial se multiplient, en inadéquation manifeste avec les attentes des internes.

Gageons, Madame la Ministre, que les internes ne tolèrent pas d’attendre plus longtemps et que le décret actant la réduction de leur temps de travail puisse être publié dans les quarante-huit heures …

Enfin, le troisième dossier éminemment important qui nous occupe aujourd’hui et qui prend une place centrale dans l’actualité, c’est évidemment le projet de Loi de santé que vous portez, Madame la Ministre.

57 articles.

57 articles dans la version finalement présentée en Conseil des ministres le 15 octobre dernier et déposée à l’Assemblée Nationale le jour même.

57 articles qui mettent le corps médical en émoi et viennent secouer ce grand corps malade de soubresauts inattendus et inquiétants faisant craindre le pire quant à la gravité du diagnostic.

Quels en sont les symptômes ?

Le premier d’entre eux et le plus visible, c’est la colère qui s’est exprimée au moment des fêtes de fin d’année à travers un mouvement de protestation dont la majorité des observateurs s’accorde à dire qu’il a été largement suivi. 70 à 80% des médecins libéraux se sont déclarés grévistes entre Noël et le jour de l’An.

Le second symptôme, plus viscéral, plus dangereux aussi peut-être, c’est l’exaspération qui prédomine chez ces mêmes médecins. Ils semblent aujourd’hui osciller entre un optimisme révolté et un pessimisme résigné.

Quelles en sont les causes ?

La plus évidente, c’est le manque indiscutable de concertation en amont.

C’est l’impression légitime pour les médecins de ne se sentir ni écoutés, ni compris.

Madame la Ministre, les syndicats d’internes et de médecins sont rarement d’accord entre eux et encore plus rarement unanimes, vous êtes bien placée pour le savoir. Ils le sont aujourd’hui sur une chose : ce projet de Loi a été construit sans eux, ce projet de Loi s’est construit sans nous.

Vous avez récemment déclaré que « la porte de la concertation était toujours ouverte » et vous avez publié le 20 janvier un communiqué de presse annonçant la mise en place de quatre groupes de travail respectivement relatifs au tiers-payant, à l’organisation des soins de proximité dans les territoires, à l’évolution de certaines compétences médicales et au service public hospitalier.

Ces groupes ont vocation, je cite, à « faire évoluer le texte avant son passage au Parlement », les premiers retours étant attendus « mi-février ».

Madame la Ministre, croyez-vous sincèrement qu’une méthode de travail qui consiste à donner trois semaines aux partenaires sociaux pour réécrire un texte que vous avez choisi de déposer au Parlement il y a plus de trois mois soit de nature à calmer les ardeurs et à répondre aux craintes des professionnels de santé ?

N’aurait-il pas été plus simple, rapide et efficace – un peu comme le tiers-payant en somme – de réunir plus tôt dans la vie du projet de Loi les acteurs que vous convoquez aujourd’hui en urgence autour de la table ?

Madame la Ministre, l’ISNAR-IMG a une histoire. Celle d’une intersyndicale gouvernée par sa base, force de propositions et choisissant systématiquement d’adopter une attitude constructive.

Madame la Ministre, vous nous rendez aujourd’hui la fidélité à cette ligne de conduite difficile.

Les 784 internes de médecine générale ici réunis ne savent plus s’il peuvent encore croire qu’il n’est pas trop tard pour prendre en considération leurs aspirations, les propositions de cette jeune génération de médecins généralistes qui consistent d’abord à accorder à la Médecine Générale la place qui doit enfin être la sienne, à la fois dans ce projet de Loi de santé et dans le futur système de santé français.

Enfin, quelles sont les conséquences ?

Ce sont celles d’une dialogue rompu, d’un dialogue de sourds aujourd’hui flagrant et conduisant certaines composantes du monde médical à formuler des revendications n’ayant plus, peu ou pas de lien direct avec votre projet de Loi.

La question de l’origine de ce dialogue de sourds a trouvé une de ses réponses lorsque vous nous avez reçus au sein de la délégation du Front Généraliste le 12 janvier. Votre projet de Loi a vocation d’être un projet de Loi pour les patients et « n’a pas pour objectif de définir la place des professionnels de santé les uns par rapport aux autres ».

Les conséquences de vos méthodes sont celles de revendications portant essentiellement sur la déconsidération dont se sentent victimes les médecins, et plus particulièrement les médecins généralistes.

Ce sont celles, enfin, d’une jeunesse médicale qui s’interroge, qui s’inquiète de son avenir professionnel, qui s’inquiète des conditions de son exercice futur, qui s’inquiète pour la survie d’un système de santé auquel elle est attachée et, au-delà du système, qui s’inquiète pour le bien-être des patients au contact desquels elle écoute, soigne et exerce quotidiennement.

Cette jeunesse médicale s’inquiète tant qu’elle finit par gronder.

Madame la Ministre, une partie de ces jeunes médecins est réunie ici et aujourd’hui devant vous.
Ils sont l’ISNAR-IMG. Ils attendent de vous un message clair et restent résolument convaincus de se former au plus beau métier et à la plus belle spécialité du monde.

Avant de vous laisser la parole, permettez-moi, Madame la Ministre, de vous renouveler mes remerciements pour votre présence parmi nous aujourd’hui.

Mesdames, mesdemoiselles, messieurs, chers congressistes, chers internes, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter à toutes et à tous un excellent Congrès.

Je vous remercie.


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